Eliminer l’argent liquide, cela apparaît à la fois de la science-fiction et parfaitement logique au vu de la révolution numérique que nous connaissons. Surréaliste, parce qu’il est difficile d’imaginer ne plus jamais toucher à un billet ou une pièce de monnaie et avoir une confiance aveugle en les banques. Pourtant les lignes se brouillent entre nos vies « off » et « online » ! Notre environnement immédiat est branché 24 heures sur 24. Ce bouleversement oblige l’économie traditionnelle et tout particulièrement le circuit bancaire à s’adapter.
Les dernières limitations pour le paiement sans contact sur les cartes bancaires viennent d’être levées par l’AMF.
L’ARGENT ÉLECTRONIQUE EST DÉJÀ UTILISÉ POUR PLUS DE 80 % DES PAIEMENTS EN SUÈDE OU EN NOUVELLE-ZÉLANDE. LE CASH POURRAIT DISPARAÎTRE EN NORVÈGE DÈS 2020.
Les solutions permettant de payer sans espèces se multiplient. Ainsi, le mobile sera de plus en plus utilisé comme moyen de paiement partout en Europe. Que cela soit Apple Pay, Samsung Wallet ou même Google, toutes les grandes firmes technologiques développent leurs propres solutions. Le marché promet d’être énorme, mais la barrière psychologique du tout numérique paraît encore difficilement franchissable.
PEUR LÉGITIME ?
Pour John Cryan, patron de la Deutsche Bank, c’est une évidence : « Le cash n’existera probablement plus dans dix ans. Ce n’est pas quelque chose qui est nécessaire, c’est terriblement inefficace et cher. » Mais les consommateurs ne l’entendent pas de cette oreille, ils se méfient des risques liés aux moyens de paiement scripturaux ou dématérialisés, certains voyant même, dans une éventuelle disparition des espèces, une véritable mesure liberticide.
LA SOCIÉTÉ SANS CASH QU’ON NOUS PROMET GRÂCE AU NUMÉRIQUE DONNERAIT AUX DÉCIDEURS LES MOYENS DE CONTRÔLER TOUT LE SYSTÈME
La société sans cash qu’on nous promet grâce au numérique donnerait aux décideurs – sans possibilité d’échappatoire pour les particuliers, faute d’avoir assez d’argent liquide – les moyens de contrôler tout le système : pensons au verrouillage récent des retraits de cash en Grèce. Dans cette société sans cash, que faisons-nous des personnes exclues du système (migrants, sans-abris), ne pouvant avoir ni carte bancaire, ni mobile ?
POURQUOI LES ÉTATS SONT-ILS SI PRESSÉS DE POUVOIR VOIR ARRIVER CETTE SOCIÉTÉ ?
Il semblerait que ce ne soit (pour l’instant/voir le texte du parlement) qu’une discussion pour trouver des éléments de lutte contre le terrorisme et l’économie souterraine, ou encore la fraude fiscale, mais pour eux, c’est le sens de l’histoire. Les avantages sont certains, les monnaies numériques rendront toutes les opérations traçables. Evidemment, Big Brother n’est pas loin, qui dit numérique, dit facilement taxable, confiscable ou saisissable…
LES CRIMINELS SE SONT DÉJÀ ADAPTÉS
LES FRAUDES À LA CARTE BANCAIRE EXPLOSENT
Tout d’abord, les fraudes à la carte bancaire explosent depuis quelques années. La technologie NFC, qu’utilisent les cartes bancaires, est loin d’être inviolable, le piratage est possible même sans la carte, selon quelques expériences menées. De plus, les criminels utilisent déjà d’autres moyens que le cash laissant peu de traces comme « des valeurs physiques (des métaux précieux par exemple) ou l’utilisation de fausses identités, ou des sociétés fictives pour faciliter les transferts de fonds ». Faut-il rappeler l’affaire des Panama Papers ou des paradis fiscaux ? La priorité serait déjà d’y mettre fin afin de s’attaquer au cœur du problème.
LA SOLUTION ? BITCOINS ET MONNAIES COMPLÉMENTAIRES
Le Bitcoin est une technologie pair-à-pair fonctionnant sans autorité centrale. La gestion des transactions et la création de bitcoins sont prises en charge collectivement par le réseau. C’est donc un nouveau système de paiement libre et ouvert, intraçable pour l’instant. Évidemment, les autorités y sont attentives et souhaitent le réglementer. Mais déjà de nombreux services et commerces acceptent cette monnaie (voir la liste), comme myshowroomprive.com, gamesplanet.com ou monchampagne.com.
Connaissiez-vous les monnaies complémentaires ? Saviez-vous qu’il y a près de mille monnaies parallèles dans le monde et rien qu’en France, il y en a une trentaine en circulation (Sol-violette à Toulouse, Stück à Strasbourg, etc.) et d’autres en projet, notamment celle de Paris. Ces monnaies sont convertibles en euros et d’un usage légal pour tout adhérent à l’association organisant leur émission et leur circulation.
LA FIN DU LIQUIDE EN FRANCE, ÇA N’EST PAS POUR DEMAIN
Avoir le choix de sa monnaie pour payer son boulanger, son pharmacien ou son plombier. Privilégier, selon le territoire, la doume, la Pêche ou le Buzuk à l’euro pour faire ses courses. Utopique là aussi au premier abord, cette liberté de choisir sa monnaie devient réalité et sera de plus en plus tendance, sans nul doute dans le futur. Elles étaient tout simplement inexistantes il y a cinq ans, et sont là avant tout pour soutenir l’économie locale et ne fluctuent pas avec les marchés financiers. Elles se placent très loin du pouvoir des banquiers, qui ont causé la crise financière de 2007 et économique que nous connaissons aujourd’hui.
La fin du liquide en France, ce n’est pas encore pour demain, même si certains pays s’en rapprochent nettement, surtout au Nord de l’Europe. Cela ne se produira peut-être même jamais, tant la barrière psychologique du tout électronique semble difficile à franchir dans le domaine des finances. Pourtant, Neha Narula nous expliquait il y a quelque temps quel sera, d’après elle, l’avenir de la monnaie.