Pour la première fois, des chercheurs ont manipulé des milliers d’atomes extrêmement froids pour créer d’étranges « portails », modifiant les propriétés des objets quantiques vus à travers eux.
Monopôles et anneaux d’Alice
La théorie prévoit que les systèmes quantiques (incluant aussi bien les ensembles d’atomes très froids que notre Univers) contiennent des objets bizarres connus sous le nom de défauts topologiques. Certains ressemblent à de longues cordes, d’autres sont encore plus étranges : des points de dimension zéro, au centre desquels des éléments comme les champs magnétiques deviennent mathématiquement impossibles à décrire.
Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Nature Communications, Mikko Möttönen, de l’université Aalto, et ses collègues sont parvenus à créer un défaut topologique se muant rapidement en un autre. À l’aide de lasers, l’équipe a frappé un groupe d’atomes de rubidium afin de ralentir leur mouvement naturel et les amener à une température proche du zéro absolu. À ce moment-là, ceux-ci se comportaient essentiellement comme un seul objet quantique, se révélant sensible aux champs magnétiques.
Des simulations informatiques et des modèles mathématiques avancés ont été utilisés pour déterminer comment modeler la direction et l’intensité des champs magnétiques afin de « tordre » les atomes jusqu’à ce qu’un « monopôle », défaut topologique présentant un magnétisme unilatéral, apparaisse. Après quelques millisecondes, les monopôles créés se sont transformés en « anneaux d’Alice », dotés d’une propriété très étrange.
« Une porte d’entrée vers un monde d’antimatière plutôt que de matière »
Comparé à « une porte d’entrée vers un monde d’antimatière plutôt que de matière », l’anneau agissait essentiellement comme un prisme révélant un univers alternatif et opposé, comparable à celui dans lequel se retrouve Alice après avoir traversé le fameux miroir dans le second volet de ses aventures, écrit par Lewis Carroll en 1871.
« Lorsque vous observez un monopôle proche à travers l’anneau ou latéralement, sa charge est différente », explique Möttönen. « Nos simulations informatiques suggèrent également que la charge d’un monopôle s’inverserait complètement s’il traversait l’anneau. »
Pour l’équipe, la prochaine étape consistera à faire passer physiquement un monopôle à travers un anneau d’Alice, afin de tester directement sa fonction de miroir/portail. Selon Janne Ruostekoski, de l’université de Lancaster, l’approche utilisée pourrait être utilisée afin de visualiser des théorèmes mathématiques abstraits et sonder différentes théories cosmologiques et physiques.
Par Yann Contegat, le
Source: New Scientist
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