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3 raisons d’aller voir Silence, un film poignant sur l’évangélisation du Japon

Scénariste et réalisateur d’un grand nombre de films devenus cultes, le talent de Martin Scorsese n’est plus à prouver. Catholique d’origine italienne, Scorsese n’a jamais caché sa foi profonde ; après « La Dernière Tentation du Christ », « Silence » revient sur l’évangélisation portugaise du Japon au XVIIe siècle. Adapté du roman de l’écrivain japonais Shūsaku Endō, le film raconte l’histoire de deux jeunes jésuites missionnaires, père Sebastião Rodrigues (Andrew Garfield) et père Francisco Garupe (Adam Driver) partis à la recherche de leur mentor Père Cristóvão Ferreira (Liam Neeson) ayant renoncé à sa foi après avoir été torturé par les japonais.


LA DERNIÈRE PROFESSION DE FOI DE MARTIN SCORSESE

Silence-ostie

Enfant, Scorsese avait l’habitude de se rendre à la cathédrale Saint-Patrick au coeur de Little Italy. Lié à Dieu par une fascination ineffable et sans limites, l’église reste au coeur de son existence toute son adolescence ; c’est ainsi qu’en 1956, il entre au séminaire afin d’être ordonné prêtre. Sans cesse ramené vers la spiritualité du fait de sa santé fragile, Scorsese dit s’être toujours senti protégé par Dieu. Cependant le cinéma eu raison de sa dévotion ; à l’instar de ses héros, Scorsese  dut choisir entre passion et ascétisme. Si l’Art n’est pas incompatible avec la religion, on ne peut dédier sa vie à l’un sans renoncer à l’autre… Après avoir fait l’expérience de modes de pensées et de croyances très diverses, après avoir goûté tous les excès de la vie d’artiste, Scorsese a décidé de revenir sur les traces de son premier amour, à savoir le Christianisme. Avec Silence, c’est une véritable profession de foi que nous révèle Scorsese, réaffirmant sa croyance comme l’Apha et l’Omega de sa vie et de son Art.

 

INTERROGER LA PLACE DU CHRISTIANISME DANS L’HISTOIRE

Au cours de l’histoire, le Christianisme a souvent répondu à une certaine ambivalence, s’il s’agissait de convertir les profanes et d’exporter la religion, les évangélistes comme les fidèles ont toujours été victimes de persécutions. Comme l’explique Martin Scorsese, les japonais disaient que si le Christianisme s’implantait au Japon, le pays perdrait l’essence même de ce qui fait son identité. Il est vrai que de nombreuses cultures ont dû s’incliner face aux monothéismes grandissants, du fait de leurs philosophies totalisantes. Si le Japon résista légitimement au Christianisme, Silence n’est pas un film sur les crimes perpétrés par l’Eglise pour convertir les infidèles, elle met à l’épreuve les croyances de ces jésuites portugais pacifistes dans une terre qui ne veut pas de leur Dieu. De tout temps, les croyants, qu’ils soient juifs, chrétiens ou musulmans ont subi des persécutions. Prêts à embrasser la mort pour leurs convictions, les deux prêtres apparaissent étrangement modernes et intemporels, en cette époque de renouveau du religieux où chrétiens et musulmans revendiquent ardemment leur foi…

 

UN CHEMINEMENT SPIRITUEL MATÉRIALISÉ PAR UNE ESTHÉTIQUE DÉPOUILLÉE

Rodrigues-montagne

Une fois établi au Japon, Rodrigues est contraint d’apostasier sa religion et de réduire sa foi au silence comme l’indique le titre. Ce silence contraint et forcé par la situation du prêtre en terre hostile, insiste en réalité sur l’idée que la religion est un rapport qui s’établit avec Dieu dans l’intimité ; personne n’est en mesure de dicter des règles pour régir l’intériorité humaine. Fasciné par la figure de Judas, Scorsese pose aussi la question de savoir si adopter une croyance nouvelle implique de renier sa croyance d’origine. Forcés d’embrasser la pensée Bouddhiste, Rodrigues et Ferreira ne semblent pour autant pas hostiles à cette nouvelle philosophie. L’intériorité est faite de métissages et de nuances, le film insiste à ce titre sur le fait que les croyances ne s’excluent pas les unes les autres. Pour représenter ce cheminement spirituel, Scorsese multiplie les plans posés et frontaux dans une ascèse esthétique remarquable. Jusque dans la réalisation, il associe les cultures et s’appuie sur le dépouillement contemplatif japonais pour parler de la foi chrétienne.

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