Bientôt, de petites mailles électroniques pourront être injectées dans le cerveau humain. L’expérience, déjà réalisée sur des souris, pourrait permettre un jour de contrôler des membres artificiels, réparer des dommages cérébraux ou encore créer des yeux artificiels sur les humains. SooCurious vous en dit plus sur cette découverte qui va changer notre rapport à l’électronique et améliorer grandement les capacités de notre cerveau.
Les mailles se composent de transistors posés sur des nanofils en silicone ; qui sont ensuite intégrés dans une solution saline. Le tout est inséré dans une seringue et directement injecté dans le cerveau de la souris où les mailles reprennent alors leur forme naturelle au bout d’une heure. Les mailles se mêlent aux neurones pour interagir avec eux, et les nanofils sont reliés à un ordinateur pour réaliser des enregistrements et stimuler les cellules.
Les scientifiques qui travaillent sur les nanofils depuis plusieurs années, ont remarqué que leur maille s’enroulait naturellement lorsqu’elle était placée dans un liquide. « Cela ressemble beaucoup à un polymère, alors nous avons pensé que nous pourrions juste l’aspirer dans une seringue et l’injecter. C’est un moyen beaucoup plus simple pour administrer les choses dans le domaine de la biologie et de la médecine », explique Charles Lieber, professeur de chimie à l’université Harvard.
Des mailles très fines et extrêmement souples
Déjà en 2012, l’équipe du professeur Lieber avait déjà construit des mailles de nanofils en silicone et ils ont démontré que ceux-ci pouvaient être capables de faire croître les nerfs, le cœur et le tissu musculaire dans le but de détecter la façon dont les cellules répondent aux stimuli. Les nouvelles mailles, elles aussi en silicone, sont beaucoup plus plates que les anciens modèles et sont en forme de parallélogramme, ce qui les aide à s’enrouler en atteignant un diamètre beaucoup plus fin qu’une aiguille. Lorsque les mailles se déroulent, elles atteignent quelques centimètres de large, soit 33 fois le diamètre de l’aiguille et mesurent 3 à 4 centimètres de long. Des fils conducteurs en polymère sont attachés aux mailles qui s’étendent à l’extérieur de la tête de la souris pour un meilleur accès a l’électronique.
La flexibilité est un facteur important lorsque l’on interagit avec le cerveau, et les mailles sont 100 000 à 1 million de fois plus plus flexibles que n’importe quel autre matériel électronique classique. « Nous voulions vraiment que le dispositif soit doux, nous ne souhaitions pas qu’il coupe ou qu’il endommage les tissus », explique Lieber. Des dispositifs plus rigides tels que les électrodes implantées chez les patients souffrant du syndrome de Parkinson causent des cicatrices qui déplacent les électrodes et les médecins sont alors obligés de les repositionner et augmenter la charge, entrainant alors de puissants effets secondaires. Les mailles, elles, sont plus petites que les cellules du cerveau ce qui permet de réduire drastiquement les chances d’un rejet.
Un dispositif aux applications multiples dans le domaine médical
Sur les souris testées, le signal s’est amplifié au bout de trois mois, et l’équipe a pu constater une migration de centaines de cellules à travers les mailles en seulement un mois. Cela suggère que les mailles s’intègrent parfaitement dans le cerveau, et pourraient meme être utilisées pour réparer les dommages causés par des convulsions ou des dommages sur la moelle épinière. « Vous pouvez pratiquement avoir des synapses artificielles avec ça », ajoute Lieber. Il faudra attendre encore plusieurs années avant que cette technologie puisse être utilisée sur les humains, l’équipe essaye encore de déterminer si le dispositif reste stable pour une durée de trois à six mois. Cependant, le fait que l’Agence américaine des produits alimentaires et des médicaments ait approuvé l’utilisation d’implants de stimulation cérébrale profonde, pourrait garantir l’acceptation de l’utilisation de ce dispositif.
A long terme Lieber espère pouvoir injecter des mailles avec des cellules souches, ou modifier leur apparence chimique pour les lier à des types particuliers de cellules, ou peut-être même construire une électronique plus complexe avec plus de fonctionnalités. Dans un proche avenir, la recherche pourrait être étendue à l’implantation d’appareils multifonctions sans fil dans des souris et à plus long terme permettre la création d’un cerveau bionique humain, grâce à l’injection du maillage électronique et de cellules dans les systèmes d’accueil pour des applications biomédicales. D’ailleurs Ray Kurzweil, directeur de l’ingénierie chez Google, a déclaré en 2013 qu’il serait possible de remplacer les parties du corps avec des dispositifs mécaniques d’ici la fin du siècle. « Selon des estimations prudentes et les calculs effectués dont vous avez besoin pour simuler fonctionnellement un cerveau humain, nous serons en mesure d’élargir la portée de notre intelligence à un milliard de fois sa taille actuelle. »
Les applications médicales de ce système sont très nombreuses : contrôler des membres artificiels, réparer des dommages cérébraux, superviser le fonctionnement cérébral et cardiaque, et tout cela sans causer de nouveaux dommages au cerveau. De plus, il n’y a quasiment aucune possibilité de rejet grâce à la souplesse des mailles. Désormais, il ne reste plus qu’à attendre que le dispositif soit utilisable sur les humains, mais c’est un véritable espoir pour l’avenir. Seriez-vous prêt à vous faire injecter ces mailles dans votre cerveau ou auriez-vous peur du résultat ?
Par Auriane Essart, le
Source: spectrum.ieee.org