Vous l’avez certainement remarqué, la tendance est au changement dans l’univers des comics et si certains s’offusquent des modifications subies par leurs personnages préférés, d’autres y voient un souhait des maisons d’édition de se moderniser. Sexualité, couleur de peau, féminisme, religion, culture sont autant de thèmes développés et diversifiés dans les oeuvres américaines. Soogeek vous expose les grands changements récents de l’industrie des comics.

En 1966, Stan Lee et Jack Kirby créaient le premier super-héros noir de l’histoire. Depuis, les choses ont bien changé pour Marvel : Tornade, Blade, Meteor Man, Nick Fury, Darwin, Bishop, Le Faucon, sont autant de personnages à la peau noir et aux capacités remarquables. Souvent mis en avant dans les comics, ils occupent une place importante dans l’univers de la Maison des Idées et dans l’imaginaire collectif. En 2011, c’était au tour de Spider-Man de changer de couleur de peau puis en 2015, Miles Morales de l’univers Ultimate héritait du costume de l’homme-araignée après la mort de ce dernier des mains du Bouffon vert. Ce tout nouveau personnage qui est à la fois d’origine africaine et portoricaine a, dès l’annonce de sa prise de poste dans les séries principales, fait les gros titres des journaux du monde entier.

 

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Créé par Brian Michael Bendis (Jessica Jones) à la demande du rédacteur en chef de Marvel Axel Alfonso, Miles Morales fut inspiré par le premier président noir américain, Barack Obama. Et si beaucoup considéraient l’arrivée de ce nouveau personnage comme la preuve d’une bonne intégration des personnes de couleur à la société américaine, très vite, des voix se sont levées pour critiquer cette nouvelle tête, que ce soit pour sa couleur ou pour le combat qu’on lui prêtait. Les membres ou soutiens du parti conservateur américain furent les premiers à crier leur mécontentement : alors qu’un journaliste radio déclarait que l’invention d’un Spider-Man « non-blanc » était un outrage, d’autres s’offusquaient de la disparition d’un héros américain.

Quelques mois auparavant, un site web révélait qu’un contrat liant Sony (propriétaire des droits d’adaptation cinématographiques du personnage) à Marvel indiquait que l’homme-araignée ne pourrait pas apparaître à l’écran s’il n’était pas blanc ou hétérosexuel. Si la plupart des autres demandes de Marvel ne servaient qu’à protéger le personnage d’adaptations trop libres (il ne devait pas torturer, jurer, fumer, vendre de drogues ou abuser d’alcool) celles concernant la couleur de peau et la sexualité de Spider-Man ont tout de même contrarié quelques lecteurs.

 

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Pourtant depuis 2011 Miles Morales reçoit un très bon accueil de la part du public et même si beaucoup pensent toujours qu’il s’agit d’un prétexte de Marvel pour booster ses ventes, il est bon de se rappeler qu’il n’est pas le dernier personnage à avoir changé de couleur. En 2013, Marvel annonçait l’arrivée dans ses pages de Kamala Khan, une héroïne musulmane de 16 vivant à Jersey City et d’origine pakistanaise. Plus récemment et dans les Young Avengers, America Chavez, jeune femme latino élevée par deux femmes, reprend le titre de Miss America. Chez DC Comics, les éditeurs avaient créé la polémique en tentant de léguer l’anneau des Green Lantern à Simon Baz, américano-libanais et musulman.

Récemment c’était au tour de Captain America d’évoluer un peu différemment : femme noire dans la fleur de l’âge, le lecteur a pu la croiser à plusieurs reprises dans les planches de Spider-Gwen, l’alter ego féminin de Spider-Man. Car oui, les héros se conjuguent de plus en plus au féminin et s’il n’y a plus rien d’étonnant à voir le costume de l’araignée porté par une femme (c’est le cas depuis 1977) il est plus original de voir d’autres icônes américaines passer le flambeau à un personnage féminin. En 2014, la nouvelle tombe et c’est Jason Aaron qui est chargé de transformer Thor en femme : même costume, même marteau, mêmes cheveux, même instinct, mais un corps différent pour s’adapter aux nouvelles lectrices. Une fois encore, de nombreux lecteurs crient au scandale, dénonçant une simple opération marketing inutile pouvant nuire au dieu d’Asgard.

 

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Inutile car de nombreuses femmes ont déjà leur propre rôle et place au sein de l’univers des comics, que ce soit chez Marvel ou DC mais les lecteurs ont longtemps pu remarquer une franche différence entre les héroïnes des deux maisons d’édition. DC Comics, les éditeurs des aventures cultes de Batman et Superman ont, depuis 1941, la charismatique Wonder Woman dans leurs rangs. Alors défenseur de liberté et de la culture américaine contre le nazisme, Wonder Woman a longtemps été représentative de la femme forte. Armée de son lasso et originaire d’une île secrète peuplée presque exclusivement de guerrières, elle porte haut et fort les revendications féministes des femmes de l’après-guerre. Bien que Marvel ait souvent fait appel à des personnages féminins en tous points fascinants, rares sont ceux à pouvoir concurrencer les héroïnes de DC et c’est aussi pour combler ce manque que la Maison des Idées tente le tout pour le tout en féminisant ses rangs.

Avant de critiquer les orientations prises par Stan Lee et ses équipes pour les personnages, il est bon de rappeler que Marvel part avec une longueur de retard. DC Comics s’est très vite imposé comme l’éditeur d’oeuvres plus adultes que son concurrent. Plus sombre, plus violent et donc avec plus de liberté pour développer des personnages réalistes. Ainsi, quand un auteur comme Alan Moore souhaitait réaliser une oeuvre sombre en y incorporant des scènes de viol, de meurtre ou de torture, il pouvait le faire chez Vertigo, la filiale adulte de DC créée en 1993, qui lui permettait aussi d’incorporer des héros d’origine, de sexe, de couleur de peau et de religion différentes. Si ici, l’aspect plus adulte de Vertigo ne rentre pas en compte dans la comparaison des deux firmes, il est tout même important dans la compréhension du développement de leurs personnages, surtout quand il s’agit de sexualité.

 

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En effet, la sexualité a souvent été taboue dans les comics. Il faut dire que pendant longtemps le Comics Code (1948) fut une réelle entrave pour les auteurs : aussi appelée CAA (Comics Code Authority) cette organisation de régulation se plaçait en outil de censure pour les éditeurs qui décidaient d’y adhérer. Parmi les nombreuses règles qu’il comprenait, le code interdisait toute sexualité dans les oeuvres. Mais force est de constater une certaine évolution sur nos planches de dessins. Là où DC avec Vertigo n’avait aucune gêne à développer des personnages sexuellement actifs (hétéro ou homosexuels), Marvel a longtemps joué les prudes et ne prenant que peu de risques sur l’orientation sexuelle de ses personnages, même si la Maison des Idées a toujours eu une sensibilité plutôt libérale.

 

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Ici, nous ne parlons pas d’exposer des scènes osées au regard des plus jeunes (les lecteurs de Marvel étant moins âgés que ceux du concurrent) mais de montrer des personnages forts, qu’importent leurs goûts en amour. Apparu dans les années 80, Vega est un super-héros charismatique dont l’homosexualité a toujours été suggérée. 12 ans après sa première aventure, il décide d’assumer haut et fort son homosexualité avant de se marier en 2012 avec l’homme qu’il aime. Dans le même temps, Daken, le fils de Wolverine, assume pleinement sa bisexualité. Chez DC Comics, c’est en 2000 qu’apparaît la première super-héroïne homosexuelle (précédée par quelques personnages secondaires) : Batwoman revient sur le devant de la scène en couple avec une inspectrice de la police de Gotham. Il en va de même pour Alan Scott, le premier Green Lantern qui est sorti du placard en 2012.

Vous l’aurez compris, les comics traversent les époques en s’adaptant à la société et récemment, les fans ont pu noter une réelle évolution dans le traitement et le développement des personnages. En plus d’offrir des histoires plus variées, ces nouveaux héros offrent la possibilité aux lecteurs de s’identifier et d’admirer des hommes et femmes aussi différents que fascinants. Quel est, selon vous, le personnage qui représente le plus la modernité recherchée par les maisons d’édition ?

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