Suite à la mort tragique du président de Nintendo Satoru Iwata, nous revenons sur sa vie de passionné du jeu vidéo et sur l’impact que ses idées novatrices ont eu sur l’industrie. Sa créativité en tant que développeur et sa vision de chef d’entreprise ont fait sa réputation, mais c’est aussi ses qualités humaines qui faisaient de Satoru Iwata un personnage clef du monde du jeu vidéo. Portrait d’un éternel joueur, d’un programmeur de génie et du président de Nintendo auquel on doit entre autres, la Nintendo DS et la Wii.

 

Un joueur et sa passion

Satoru Iwata arrive dans notre monde le 6 décembre 1959 sur l’île septentrionale japonaise d’Hokkaido. Son père est le maire de sa ville la plus importante, Sapporo. Satoru aurait pu devenir beaucoup de choses, mais une obsession pour la technologie le dirige très tôt vers les jeux vidéo. Il construit déjà son futur durant sa scolarité, pas dans ses cahiers, mais en programmant des petits jeux sur sa calculatrice électronique qu’il fait pour l’unique plaisir de voir ses amis y jouer. Il n’a pas fini le lycée qu’en plus d’aimer les jeux vidéo, il sait déjà en faire et fait partager sa passion autour de lui. Bien décidé à poursuivre dans une voie à l’époque encore très obscure, il intègre l’université de technologie de Tokyo. Malheureusement, les cours ne parlent pas vraiment de jeux vidéo. Cela ne l’empêche pas de finir numéro 1 de sa promotion en plus de programmer des jeux sur son temps libre avec un groupe d’amis. Ils économisent pour pouvoir louer un appartement faisant office de bureau afin de pouvoir développer leurs idées novatrices. Ce groupe deviendra ensuite HAL Laboratory, la première étape de la carrière impeccable de Satoru Iwata.

 

 

Il oscille entre ses cours et ses créations et met en application ce qu’il apprend au fur et à mesure de sa progression. Passionné par la technologie et travailleur infatigable, Satoru a le feu sacré. Plus le temps passe, plus son amour pour les jeux lui donne envie de faire partager sa passion au monde entier. Que l’on puisse sourire et s’amuser en jouant à ses jeux : voilà son rêve le plus cher. Malgré ses études très prenantes, il poursuit son travail de programmeur chez HAL Laboratory. L’obtention de son diplôme ne suffit pas à convaincre son père que poursuivre sa carrière dans le jeu vidéo est une bonne idée. Cela ne l’empêche pas de croire en l’avenir. « Pendant six mois, mon père ne m’adressait plus la parole. Mais j’avais une foi inébranlable en l’avenir. » Travaillant maintenant à temps partiel chez HAL Laboratory qui ne compte alors que 5 membres, il débute sa carrière en inventant des nouveaux périphériques pour ordinateur, mais garde un oeil sur l’horizon jeu vidéo. C’est une époque décisive pour lui, car elle l’oriente définitivement dans ce qui le passionne et ce premier manque d’opportunités lui donne encore plus envie de créer dans l’univers du jeu vidéo.

 

 

HAL Laboratory

Le nom fait tout de suite référence à l’intelligence artificielle de 2001, l’Odyssée de l’espace, mais Iwata confiera plus tard que c’était aussi une façon de croire en leur potentiel en se comparant à IBM. Dans l’alphabet, « chacune des lettres de HAL nous mettait un cran avant IBM« . Alors que Nintendo prévoit d’envahir les salons japonais avec sa Nintendo Entertainement System, Iwata pousse HAL à se rapprocher du futur géant. Nintendo d’abord peu intéressé par la petite entreprise confie à Iwata un projet bancal qu’il réussit cependant à redresser : Pinball, un jeu de flipper arcade sorti en 1984. Grâce à cette expérience, il devient plus impliqué dans son premier vrai jeu : Balloon Fight. Il doit attendre quelques années pour retrouver des projets d’envergure chez Nintendo en développant Mother (EarthBound) en 1989. Mother est une série de RPG entre poésie et inventivité qui a marqué les joueurs à vie. Encore aujourd’hui, une suite à Mother est l’une des demandes les plus récurrentes de la part des joueurs japonais. Il passe ensuite aux premiers Kirby, toujours pour Nintendo dans le début des années 90. Prenant de plus en plus de poids aux yeux de Nintendo et HAL Laboratory étant prête à faire faillite, Iwata en devient le président en 1993 et sauve l’entreprise de la catastrophe.

 

 

Un développeur de génie
Il poursuit sa collaboration avec Nintendo en tant que programmeur sur Kirby’s Dream Land en 1992 et plus tard Super Smash Bros., apportant de nombreuses idées révolutionnaires et audacieuses, affirmant qu’un développeur ne doit jamais être effrayé par les challenges. « Un développeur ne dit jamais non. » Satoru n’est toujours pas officiellement chez Nintendo, mais semble devenir de plus en plus indispensable pour développer les jeux à gros potentiel. Nintendo fait encore appel à lui pour participer au développement de Pokémon et Iwata s’assure de son internationalisation avec les versions Rouge et Bleue faisant suite aux versions Rouge et Verte japonaises. Eh oui, si vous avez joué à Pokémon étant petit, c’est aussi grâce à Satoru Iwata. Rien que pour ça, le monsieur mérite le respect éternel. Tsunekazu Ishihara, ayant déjà travaillé avec lui depuis son propre studio sur Mother, fonde également Creatures Inc. qui va devenir le distributeur des cartes à jouer Pokémon, renforçant encore plus les relations professionnelles de Iwata avec l’univers Pokémon.

 

 

Malgré ses responsabilités avec HAL, il travaille d’arrache-pied pour Game Freak. Il réussit à refaçonner le code utilisé pour Pokémon Rouge et Bleu en moins d’une semaine pour l’intégrer à la Nintendo 64 et permettre la création de Pokémon Stadium. Mais son coup de maître est signé en 1999 lorsque Iwata fait en un week-end ce que d’autres avaient conclu impossible en une semaine. L’idée était de compresser Pokémon Or et Argent pour permettre d’intégrer plus d’éléments au jeu, mais l’équipe n’y arrivait tout simplement pas avec les outils de compression de l’époque. Iwata a contourné le problème en inventant lui-même un nouveau mode de compression. Le résultat ? Game Freak a pu intégrer Kanto dans le jeu, la zone de la première génération. Jusqu’à aujourd’hui, avoir accès à deux régions dans un jeu Pokémon est devenu l’une des demandes les plus fréquentes des fans et est souvent réservé aux « troisièmes versions », venant après le duo d’origine (par exemple la version Platine donnant suite à Diamant et Perle dans la quatrième génération). Avec son travail autour de Pokémon, Satoru Iwata prouve à Nintendo qu’il est un programmeur de génie.

 

 

En 1998, HAL Laboratory maintenant une véritable filiale de Nintendo, s’attaque au développement de Super Smash Bros., sous la direction de Masahiro Sakurai. L’idée est d’abord de créer un jeu de combat jouable à 4 pour la Nintendo 64, mais les jeux de combats n’étant pas de gros succès à ce moment de l’histoire du jeu vidéo et n’étant pas du tout le genre de l’entreprise, les développeurs se heurtent aux avis sceptiques de Nintendo. Ce n’était de toute façon pas un concept novateur ou même très intéressant dans la tête des exécutifs de Nintendo, poussant Iwata et Sakurai à se creuser la tête pour pouvoir faire valider le projet. Ils décident d’intégrer les personnages phares de l’univers Nintendo dans le jeu et de les faire combattre. Sans avoir l’accord de Nintendo pour utiliser les personnages, HAL démarre le développement d’un prototype en se donnant corps et âme au projet.

 

 

L’équipe est terrorisée de présenter le projet, mais lorsque les testeurs prennent les manettes en mains devant les producteurs de Nintendo, « ils ont souri, ils ont rigolé ensemble et se sont crié dessus pendant les combats« . D’abord un projet auquel les autres ne croyaient pas, c’est le plaisir du jeu qui a convaincu tout le monde sans qu’Iwata ou Sakurai ait besoin de dire un mot de plus. Iwata parle de ce moment comme l’une de ses plus grandes fiertés. Ayant foi en son idée comme il avait foi en l’avenir lors de sa jeunesse, il participe à donner naissance à cette franchise maintenant culte. Le jeu n’est pas sorti qu’Iwata le considère déjà comme un succès. Succès qu’il ne mesure pas encore en chiffres des ventes et en parts de marché, mais en sourires des joueurs. Super Smash Bros. est donc en bonne voie, mais pose encore un problème : Est-ce que ça ressemble vraiment à Nintendo de permettre à Mario de tabasser Pikachu ? Iwata réfléchit au problème et le contourne en changeant les prémices de la question. Ce n’est pas Mario qui frappe Pikachu et Link qui tranche Donkey. Non, ce sont des figurines virtuelles que collectionne le joueur qui s’affrontent pour s’amuser. Malin !

 

 

La transition

Quoi qu’il arrive, il n’abandonne pas la programmation malgré ses nouvelles responsabilités et prouve qu’il est capable d’être un développeur visionnaire. La tête dans les nuages, mais les pieds fermement ancrés au sol, il sauve HAL Laboratory de la faillite et devient indispensable à Nintendo pour la production de ses plus gros titres. Il sait anticiper les envies des joueurs, car lui-même est un passionné qui se remet toujours en question. Comme il le résume, à cette époque, il était « plus un programmeur et un développeur qu’un chef d’entreprise« . Hiroshi Yamauchi, le troisième président de l’histoire de Nintendo a déjà ses yeux sur le jeune Satoru depuis longtemps et l’intègre définitivement à Nintendo en 2000 en le nommant chef de la division de planification d’entreprise. Heureux d’avoir le respect d’un géant comme Yamauchi et d’avoir l’opportunité de travailler avec le grand Shigeru Miyamoto, Iwata accepte son offre. Cela ne vous surprendra pas, mais il garde tout de même du temps pour se consacrer à son premier amour : la programmation et le développement.

 

 

La version GameCube de Smash Bros. étant développée par ses anciens collègues de HAL Laboratory, il se greffe à l’équipe et dirige l’équipe de test tout au long du développement. L’impact décevant de la GameCube se fait ressentir malgré la bouée de sauvetage qu’est la franchise Pokémon. Yamauchi prépare Iwata aux responsabilités qu’il compte bien lui léguer en faisant de lui son second, puis prend sa retraite en mai 2002. Satoru Iwata est désigné successeur et devient le quatrième président de Nintendo – le premier à ne pas faire partie de la famille fondatrice de l’entreprise depuis sa création en 1889 par Fusajiro Yamauchi. Satoru Iwata ne compte pas gouverner seul et s’entoure d’un conseil exécutif et s’impose comme première mission de sortir Nintendo de son autosuffisance bancale. Il renoue les liens avec d’anciens studios comme Squaresoft, Namco et Sega, et stabilise quelque peu la situation financière de l’entreprise. Mais ses ambitions vont dépasser les attentes du monde entier. Satoru Iwata étant Satoru Iwata, il réfléchit à l’industrie du jeu vidéo d’une autre façon et plutôt que de poursuivre une compétition stagnante, met l’innovation au coeur du cahier des charges de Nintendo.

 

Un président pour l’innovation : la Nintendo DS et la Wii

 

 

 

« Sur ma carte de visite, je suis un chef d’entreprise. Dans mon esprit, je suis un développeur de jeux. Mais dans mon coeur, je suis un joueur. » On a déjà survolé sa passion pour le jeu vidéo et ses talents de développeur, mais qu’en est-il de son travail en tant que leader du géant du jeu vidéo japonais ? Mettre l’innovation au premier plan lui semble être la bonne route à prendre. Il prend des décisions que d’autres n’oseraient pas prendre et démarre la conceptualisation de la Nintendo DS. Faire un futur qui ressemble au passé, alliant tradition et innovation dans un esprit purement japonais, la Nintendo DS rappelle les premiers écrans doubles que Nintendo avait commercialisés dès 1982 à l’époque de Game & Watch alors que Iwata rêvait encore d’intégrer les équipes de Nintendo. Le concept est novateur, mais beaucoup prédisent à tort son échec face à la PSP de Sony. Son écran tactile charme les foules bien avant les smartphones et la Nintendo DS devient la console la plus vendue de l’histoire en 2012. Son esprit de développeur lui permet de créer un système sur lequel les programmeurs pourront travailler avec aise et il pousse les franchises cultes de Nintendo à envahir la console portable.

 

 

Au-delà de ça, il pense à la part du gâteau financier que personne n’a encore mangé et souhaite faire venir vers le jeu vidéo des portions de la population qui jouaient alors moins aux jeux vidéo, plus spécifiquement les femmes et les personnes âgées. Grâce à des titres comme Nintendogs et à la gamme de jeux Touch! Generation (Programme d’entraînement cérébral, Picross, etc.) qui vise justement à atteindre ces publics, il réussit son défi. L’écran tactile permet de faciliter cette transition en mettant légèrement de côté les configurations à boutons qui peuvent perturber les plus vieux. Les questions des parents du genre « Mais comment tu sais sur quoi appuyer ? » laissent peu à peu place à des « Je vais peut-être m’en acheter une aussi ! ».

Depuis la sortie de la Nintendo DS, la tendance a effectivement changé, et c’est largement grâce à Satoru Iwata. Son audace va évoluer par la suite et donner naissance à la Nintendo 3DS qui connaîtra un succès fulgurant en intégrant la vision 3D au jeu vidéo et en améliorant tout ce qu’offrait déjà la DS. Le succès historique de la DS permet à Iwata de redoubler d’ambition par rapport à l’innovation dans le jeu vidéo. Selon lui, les jeux doivent avant tout être amusants et pouvoir être joués par tous. Et les jeux, ce n’est pas ce qu’il manque avec la Nintendo DS : New Super Mario Bros, Nintendogs, Mario Kart, Pokémon, Animal Crossing, Dragon Quest, The Legend of Zelda, bref, de quoi s’éclater pendant des mois ! Après le succès de sa console portable innovante, il prépare son prochain chef-d’oeuvre en s’attaquant aux consoles de salon.

 

 

« Avez-vous des amis ou des membres de votre famille qui ne jouent pas aux jeux vidéo ? Et pourquoi ne le font-ils pas ? » Satoru Iwata posait alors la question aux développeurs de Nintendo. « Vous êtes-vous déjà imposé le challenge de créer un jeu auquel vous ne joueriez pas ? […] Notre second objectif est de présenter quelque chose de nouveau aux joueurs, quelque chose qu’ils ne savaient même pas qu’ils voulaient. » Poursuivant sa quête d’attirer les non-joueurs et de donner quelque chose de nouveau aux hardcore gamers, Satoru Iwata dévoile la Nintendo Wii : un système révolutionnaire permettant de détecter la position du joueur et de sa manette pour interagir avec le jeu d’un mouvement de poignet. C’est de loin la console la plus créative de l’Histoire qui offre une toute nouvelle façon de jouer, un monde d’interactivité à découvrir et donne la possibilité aux concepteurs de jeux vidéo de réfléchir aux jeux différemment. Au-delà de ça, l’ensemble du marketing et le nom même de la console tentent de rapprocher les joueurs, les amis et les familles. Wii, comme We (nous en anglais), car elle est destinée à tout le monde et que l’on est censé en profiter ensemble.

 

 

La Wii remplit les deux objectifs : attirer de nouveaux joueurs et être le fer de lance de l’innovation dans le jeu vidéo. Elle devient la console la mieux vendue de la septième génération, devant la PlayStation 3 et la Xbox 360. Le mur qui séparait les joueurs des non-joueurs est maintenant détruit. Quel que soit l’âge, le sexe ou l’expérience d’un joueur, n’importe qui est intrigué par la console et peut y jouer. Cela est en partie possible grâce à la brillante idée de faire de la manette une sorte de télécommande. Car qui ne sait pas utiliser une télécommande ? C’est un objet qu’un enfant de 3 ans comme une adulte de 90 ans connaît. Plus familier, donc plus apte à être pris en main. La grande majorité des nouveaux joueurs ont pu se familiariser avec le système à travers Wii Sports (83 millions de copies vendues) alors que les joueurs en attente de nouvelles expériences ont pu s’éclater sur les prodigieux Super Mario Galaxy, The Legend of Zelda : Twilight Princess puis Skyward Sword, Metroid Prime ou Resident Evil. Même les détracteurs de Nintendo ne peuvent nier la créativité de l’entreprise. Satoru Iwata comprenait plus que quiconque qu’intégrer les nouvelles technologies est essentiel pour le renouvellement du milieu du jeu vidéo, qui après l’apparition du tactile et de la reconnaissance de mouvements, est destiné à connaître la révolution holographique et la réalité virtuelle.

 

 

Un président proche des joueurs

Satoru n’est pas seulement un prénom masculin, mais est aussi un verbe se traduisant par « comprendre« . Et comprendre dans le sens large du terme est la toute la clé de la réussite de Satoru Iwata. Lui-même est un personnage à trois facettes. Comme il l’a dit : un chef d’entreprise, un développeur et un joueur. Ce n’est pas un PDG nommé uniquement pour ses talents de leader ou d’analyste, mais un joueur devenu développeur, devenu chef d’entreprise. Car il ne mesure pas son succès en termes de yen, mais en termes de sourires sur le visage des joueurs, Satoru Iwata voulait s’adresser directement aux joueurs. Il organise donc les Nintendo Direct. Dans ces présentations en ligne se déroulant environ une fois par mois depuis octobre 2011, Satoru Iwata devenait l’hôte de son propre show. Dans la version européenne, la charge revenait à Satoru Shibata et pour les Américains, c’était le célèbre Reggie Fils-Aime. Pour les grandes présentations internationales, c’était bien entendu Iwata qui prenait le flambeau. Rapprochant les joueurs de l’entreprise, l’émission présentait les différents jeux et consoles de Nintendo tout en apportant diverses anecdotes sur le développement des produits.

 

 

Un showman marrant et pertinent, Iwata veut aussi créer une deuxième émission où il irait à la rencontre de ses collègues développeurs pour que ces derniers puissent parler de leur métier, de l’avancement des jeux en cours sur DS, Wii, 3DS et Wii U : ainsi arrive Iwata Asks. La personnalité rafraichissante et presque candide de Iwata rend les interviews très accessibles et on a plus l’impression d’être invité à une conversation privée que dans une émission en ligne. Les créateurs parlent des joies et des frustrations du développement et s’étendent sur les concepts importants relatifs à chaque jeu. Tout au long de sa carrière, Satoru Iwata sera resté proche des différentes divisions et équipes de Nintendo. Le New York Times le reconnait d’ailleurs en 2007 et 2008 comme l’un des meilleurs dirigeants d’entreprise du monde. Se donnant un salaire relativement bas par rapport aux autres leaders de l’industrie du jeu vidéo, il n’hésite pas non plus à diviser son salaire à deux reprises suite aux problèmes de Nintendo en 2010. Selon lui, les créateurs ne peuvent pas travailler convenablement s’ils se réveillent tous les matins en se demandant s’ils vont perdre leur gagne-pain. Cette tradition de diviser son salaire pour sauver les employés est très répandue au Japon et offre un contraste très net avec la mentalité des patrons occidentaux.

 

Son héritage

Une longue histoire pour un personnage majeur du jeu vidéo. En espérant que beaucoup de développeurs et producteurs prendront conscience de la bonne direction que prenait Iwata lorsqu’il plaçait les joueurs et l’innovation en premier plan. Derrière ce professionnel hors pair, un homme très touchant qui respectait chacune des licences de Nintendo comme un héritage dont il était le gardien. Sa disparition laisse un vide dans l’industrie que trop peu peuvent prétendre pouvoir remplir. La première alerte par rapport à sa santé avait été donnée avant l’E3 de 2014 où il fut interdit de voyager par son médecin suite à une opération pour retirer une tumeur. La besogne faite, les pronostics étaient très prometteurs et Satoru semblait avoir vaincu son démon.

 

 

Une plus récente perte de poids inquiétait certains, mais rien d’étrange après une telle expérience, surtout lorsque Iwata réapparaissait plus vivant que jamais et toujours aussi heureux de faire son métier. On était assez loin de se douter que le cancer allait refaire surface et nous enlever ce personnage emblématique de l’industrie. Emblématique de par l’étendue de ses accomplissements qui viennent tous d’une passion inébranlable pour le jeu vidéo. Il est mort le 11 juillet 2015 d’un cancer des voies biliaires. Son service funéraire de deux jours attire plus de 4000 personnes venues lui rendre hommage. Shigeru Miyamoto et Genyo Takeda vont prendre la direction de Nintendo de façon temporaire et ont exprimé lors de ses funérailles, leur volonté de poursuivre la mission d’Iwata en indiquant qu’il avait « planté une graine qui un jour grandira en une fleur magnifique, permettant aux gens du monde entier de sourire« .

 

 

Il y a de ça quelques mois seulement, Satoru Iwata promettait aux joueurs que la prochaine console de Nintendo connue pour l’instant sous le nom de NX surprendrait le monde et serait un concentré d’innovation. Conscient de l’attente du public suite au succès mitigé de la Wii U, il confiait qu’il n’allait pas se contenter de continuer à tabler sur un hardware déjà existant, car cela rendrait le monde ennuyeux. Un écho au début de sa carrière marqué par son inventivité à créer de nouveaux outils plutôt que de tenter de résoudre les problèmes des outils existants. L’important était de créer des jeux, des jeux amusants pouvant rapprocher les gens du monde entier. Souvenez-vous de son maintenant célèbre discours en 2005, après la sortie de la Nintendo DS, mais avant celle de la Wii. Satoru Iwata rappelait alors que le plus important, au-delà de toutes les divergences, est ce qui nous rapproche tous : l’amour du jeu vidéo.

« Même si nous venons de différents coins du monde et parlons des langues différentes ; que nous mangeons trop de chips ou de boulettes de riz, même si nous avons des goûts différents en termes de jeux, tout le monde ici est identique de la manière la plus importante qui soit : chacun de nous a le coeur d’un joueur. »

 

On se souviendra de lui pour ses réussites professionnelles, mais aussi pour sa personnalité et son amour infaillible pour le jeu vidéo. Satoru Iwata a libéré le jeu vidéo de ses plus grands préjugés en l’ouvrant au monde entier. Relevant tous ses défis avec aplomb, il aura su faire prospérer les franchises les plus populaires du jeu vidéo tout en proposant de nouvelles façons de jouer. Le monde perd un chef d’entreprise exemplaire, un développeur de génie et l’un de ses plus grands joueurs. À travers ses jeux et ses consoles, quel impact a eu Satoru Iwata sur votre vie de joueur ?

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