Un retraité allemand est parvenu à résoudre un problème mathématiques qui résistait aux plus grands esprits de la discipline depuis plus de 50 ans ! Mieux, la solution lui serait venue spontanément alors qu’il se lavait les dents.

Un théorème vieux de près de 60 ans

La conjoncture de corrélation gaussienne est un théorème qui taraude la communauté des mathématiciens depuis les années 1950. Émise dans un papier en 1955, puis développée par Olive Jean Dunn en 1958 qui l’énonce définitivement en 1972, elle n’avait jusqu’alors jamais été prouvée, malgré l’acharnement de nombreux mathématiciens à travers le monde.

Cet théorème géométrique fait l’hypothèse suivante : si deux formes différentes centrées à l’origine se chevauchent (comme un cercle et un rectangle), alors la probabilité d’en frapper une (dans un jeu de fléchettes par exemple), augmente la probabilité de frapper l’autre. En langage scientifique, on dit que la proportion de fléchettes débarquant dans l’intersection des deux formes n’est pas inférieure au produit de la proportion des fléchettes qui débarquent dans chacune des formes.

schéma illustrant le théorème à l’aide de fléchettes

 

Une idée tombée du ciel

Or, grillant la priorité aux nombreux mathématiciens qui cherchent à démontrer cette hypothèse depuis parfois des décennies, c’est finalement un retraité allemand de la banlieue de Francfort qui a trouvé la solution ! Un matin de juillet 2014, Thomas Royen, 67 ans au compteur, se lave tranquillement les dents lorsqu’il est frappé par une idée soudaine.

M. Royen n’est certes pas un mathématicien de profession, mais il n’est pas non plus le premier venu dans cette discipline. Il a en effet effectué toute sa carrière dans l’industrie pharmaceutique. Son travail : améliorer les formules statistiques afin de donner du sens aux essais médicamenteux. C’est en substance l’idée qu’il a ce matin là et qui va lui permettre de résoudre le conjoncture comme il l’explique au magazine Quanta : « au soir de ce jour-là, le premier brouillon de ma preuve était écrit ».

Ange gardien de Pietro da Cortona, 1656. « On peut travailler longtemps sur un problème lorsqu’un ange – qui figure ici le mystère de nos neurones – amène soudain une bonne idée », a déclaré M. Royen suite à a découverte.

 

Un démonstration scientifique

L’intuition qu’a Thomas Royen est que la problématique posée peut être réécrite à l’aide de formules statistiques. Cela va lui permettre de simplifier la conjecture, et surtout de la résoudre à l’aide d’un terrain qu’il connait bien : celui des statistiques, sur lequel il a travaillé toute sa vie. Il maîtrise en effet aussi les codes de la démonstration mathématique, et sait qu' »un problème singulier en apparence difficile peut être résolu en répondant à un questionnement plus général ».

Il écrit alors son papier, sobrement intitulé « a simple proof of the Gaussian inequality conjecture » (une simple preuve de la conjecture de corrélation gaussienne), qu’il envoie au site de publications scientifiques en attente de validation, arxiv.org. Il envoie également son papier à des experts de renoms, qui ont parfois passé des dizaines d’années à travailler sur ce problème. L’un d’entre eux, Donald Richard, un mathématicien de l‘Université de Pennsylvanie qui essayait ainsi de résoudre ces équations depuis près de 30 ans, a « tout de suite compris » que M. Royen avait résolu le problème.

Pourtant, un léger tant de latence s’est écoulé avant que la solution s’ébruite au sein de la communauté scientifique. Il faut dire que le découvreur a joué la malchance : alors qu’il avait envoyé son papier au Dr Klartag de l’Institut Weizmann pour la Science et de l’Université de Tel-Aviv, celui-ci n’avait pu l’examiner par manque de temps. Le retraité, très modeste, n’avait d’ailleurs pas particulièrement insisté pour que son papier soit publié dans une revue académique. Aujourd’hui, il espère simplement que « cette preuve étonnement simple encouragera les jeunes étudiants à chercher de nouveaux théorèmes mathématiques. Un haut niveau de connaissance théorique n’est pas toujours requis », précise-t-il. Espérons donc que son message soit entendu !

La conjecture tire son nom de Carl Friedrich Gauss (1777-1855), philosophe et mathématicien Allemand surnommé « le prince des mathématiques ».
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