La réponse à cette question dépend de plusieurs facteurs : si on est sourd de naissance ou si on l’est devenu après avoir appris à parler, si on est Français ou si on vient d’ailleurs… Mais tout semble être une question d’images.

Lorsqu’une personne devient sourde après un accident ou une maladie mais qu’elle a déjà appris à parler, il paraît logique qu’elle continue de penser sous forme de mots, dans la langue apprise durant l’enfance. La question est en revanche plus compliquée lorsqu’on s’intéresse aux personnes sourdes de naissance.

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En effet, comme le déplore l’anthropologue et ancien directeur de recherche au CNRS Yves Delaporte, « il n’est malheureusement pas possible de se glisser dans la tête d’une personne sourde et de pouvoir comparer ses pensées à celle d’un “ entendant ” ». Cependant, l’expert travaille depuis de nombreuses années sur le langage des sourds, et côtoie de près des malentendants, qui lui ont expliqué qu’elles « pensaient par images à partir de leur propre langue des signes ».

Car le langage des sourds est loin d’être unique et universel. En fonction des pays et même des régions, des dialectes se sont mis en place. Yves Delaporte explique : « En France, chaque institut spécialisé pour les sourds (à Paris, Clermont-Ferrand, Metz, Arras, etc.) a développé sa propre langue des signes au cours du 20e siècle. Puis, durant les années 1980, un intérêt croissant est apparu pour cette forme de langage et le dialecte parisien s’est imposé dans l’Hexagone. Il s’est produit un phénomène similaire pour le français concernant les entendants : le dialecte d’Ile-de-France s’est imposé au cours du 20e siècle, car c’était celui diffusé à la radio ».

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Ainsi, il y a de fortes chances pour qu’un malentendant français de naissance visualise sous forme d’images les gestes de la langue des signes françaises (LSF). Yves Delaporte souligne la proximité de cette langue avec le chinois, plus axé sur les images que le français, et qui se compose de gestes signifiant un mot ou une phrase entière, associés à un alphabet dactylologique permettant d’épeler les noms propres ou les mots qui ne possèdent pas encore leur propre signe. Tout comme un entendant, en voyant le geste évoquant le cinéma, une personne sourde se remémorera les souvenirs et les sensations liés à cette sortie !

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