Le télescope Hubble a observé une planète totalement noire qui « mange » la lumière

En termes d’objets célestes étranges et fascinants, nous connaissions déjà les trous noirs ou encore la mystérieuse étoile qui déconcerte les scientifiques. A cette liste, nous pouvons désormais ajouter cette planète découverte par le télescope Hubble qui est complètement noire et qui ne réfléchit quasiment pas la lumière.

 

Une planète noire comme l’asphalte

WASP-12b est une exoplanète située dans la constellation du Cocher (Auriga), à plus de 870 années-lumière de la Terre. Contrairement à d’autres exoplanètes, celle-ci intrigue les scientifiques non pas pour sa ressemblance avec notre planète bleue ou pour l’éventualité d’une présence de vie à sa surface. Non, ce qui fait son intérêt est qu’elle est totalement noire et qu’elle absorbe la lumière de son étoile.

Au lieu de réfléchir une grande partie de la lumière captée par son atmosphère, comme la plupart des planètes et corps célestes le font dans l’Univers, WASP-12b « emprisonne » plus de 94 % de la lumière émise par l’étoile voisine dans son atmosphère. Cette dernière est d’ailleurs totalement noire, « comme de l’asphalte frais » .

« Nous ne nous attendions pas à découvrir une exoplanète aussi sombre » , raconte Taylor Bell, de l’Université de McGill et l’Institut de Recherche sur les Exoplanètes de Montréal (Canada). Le chercheur, en charge de l’étude publiée dans l’Astrophysical Journal Letters, ajoute : « La plupart des planètes de ce type réfléchissent environ 40 % de la lumière des étoiles » .

L’exoplanète possède un albédo (degré de réflectivité placé sur une échelle allant de 0 à 1) de 0,064. A titre de comparaison, la Lune possède un albédo de 0,12. Cela en fait ainsi l’un des astres les moins réfléchissants de l’Univers (mais ce n’est rien comparé au Vantablack, le matériau le plus sombre au monde, dont l’albédo est de 0,00035).

Vue d’artiste de la planète WASP-12b et de son étoile.

 

Côté jour, côté nuit

Observée pour la première fois en 2008, WASP-12b fait partie des planètes de type Jupiter chaud, c’est-à-dire des immenses planètes gazeuses qui possèdent une orbite très proches de leur étoiles respectives et qui sont, par conséquent, extrêmement chaudes. WASP-12b fait quant à elle le double de notre Jupiter. Son atmosphère est tellement chaude du côté diurne de la planète que la plupart des molécules sont incapables de survivre dans cet environnement, où la température monte jusqu’à environ 2 540 degrés Celsius. Une température aussi élevée que chez une étoile de petite taille.

C’est pour cette raison que, selon les scientifiques de la NASA, les nuages sont incapables de se former de ce côté de la planète pour réfléchir la lumière en direction de l’espace. Ainsi, la lumière incidente provenant de WASP-12 (l’étoile) pénètre profondément dans l’atmosphère de WASP-12b où elle est absorbée par les atomes d’hydrogène et ensuite convertie en énergie.

Cette exoplanète est également remarquable pour une autre particularité : elle a une rotation synchrone avec son étoile. Dans le jargon scientifique, on parle également de verrouillage gravitationnel. Cela fait que le temps que met la planète à tourner sur elle-même est le même qu’elle met pour tourner autour de son étoile (approximativement 1 jour). Ainsi, comme la Lune, le côté qui fait face à l’étoile est toujours le même quoiqu’il arrive. C’est pour cela que la planète WASP-12b possède un côté perpétuellement ensoleillé et un autre où il fera toujours nuit.

Ce côté nocturne est d’ailleurs beaucoup moins chaud que son penchant diurne : l’atmosphère de cette partie de la planète atteint seulement les 1 200 degrés Celsius. Cet environnement relativement moins chaud permet à la vapeur d’eau et aux nuages de se former.

Comparatif de taille entre Jupiter et WASP-12b.

 

Une planète consumée par sa propre étoile

De telles températures pour la surface d’une planète, certes très rapprochée de son étoile, était quasiment inédite, mais il y a une explication : la force de marée, qui est le même phénomène qui cause les marées dans les océans terrestres (d’où son nom). Cette force d’attraction gravitationnelle très puissante est renforcée par la proximité qu’a WASP-12b avec son étoile.

Ces forces de marée sont telles que la planète n’a pas une forme quasi-sphérique comme notre planète mais plutôt une forme ovale, proche de celle d’un œuf. Ces facteurs font que l’exoplanète perd régulièrement une partie de sa masse, à peu près six milliards de tonnes par seconde, qui sont absorbées par l’étoile qu’elle orbite.

Pour Shulin Li, astrophysicienne au Kavli Institute for Astronomy and Astrophysics de l’Université de Peking, à ce rythme, WASP-12b finira par s’éteindre définitivement d’ici une dizaine de millions d’années, la totalité de sa masse entièrement avalée par l’étoile.

Il est certain que WASP-12b a encore beaucoup de choses à nous apprendre, notamment en ce qui concerne le comportement des Jupiter chaudes comme celles-ci. C’est encore une fois la preuve que l’Univers nous dévoile ses secrets petits à petits et que certains risquent vraiment de nous surprendre.

Vue d’artiste de WASP-12 absorbant le gaz de la planète. Le gaz s’échappant de celle-ci forme ensuite une sorte d’anneau qui entoure l’étoile.
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