Certaines ethnies de la planète sont célèbres grâce à des traditions exceptionnelles et emblématiques. C’est le cas des Padaung, dont les femmes portent de grands colliers qui leur ont valu le surnom de « femmes girafes ». Si les Padaung sont surtout connus pour cette tradition hors normes, ils possèdent bien une culture à part entière qui risque de se perdre. DGS vous emmène à la rencontre de ces hommes et de ces femmes.
  

Le nom Padaung ne vous dit peut-être rien, mais vous avez sûrement déjà vu des photographies de « femmes girafes », ces femmes Padaung portant un épais collier métallique donnant l’impression que leur cou est allongé de manière démesurée. Cette pratique si particulière est propre aux Padaung, aussi connus sous le nom de Kayan, même si ces derniers sont en fait très peu nombreux (ils seraient environ 7000 personnes) et constituent une minorité appartenant au peuple des Karens rouges (ou Karenni), un groupe ethnique fort de quelques 4 à 5 millions de personnes, historiquement implantés dans le sud-ouest de l’actuel Myanmar (anciennement Birmanie).

 

Une jeune fille Padaung en tenue de fête au début du XXe siècle : 

 

 

Des femmes Padaung au début du XXe siècle : 

 

Les Karens eux-mêmes représentent une population qui a été longuement opprimée, et qui subit encore aujourd’hui de nombreuses persécutions. Historiquement, les Karens rouges ont très probablement fui la Chine à la fin du premier millénaire et se seraient installés dans l’actuel Myanmar à cette époque. Là, ils auraient subi le joug des différentes monarchies qui se sont succédé dans la plaine birmane et les abus qui y étaient liés : travail forcé, déplacements de populations, déportations…

 

Des femmes Padaung : 

 

 

Une femme Padaung et son bébé : 

 

Au XXe siècle, après l’indépendance de la Birmanie (elle appartenait auparavant à l’Empire colonial britannique), de nombreux Karens se sont battus pour pouvoir faire naître un État Karen indépendant, ce qui a dégénéré en une guerre avec la junte militaire birmane. Beaucoup de Karens ont dû fuir le Myanmar pour la Thaïlande voisine, où ils survivent dans des camps de réfugiés où les conditions de vie sont très variables. De nombreux Padaung s’y trouvent et certains n’hésitent pas à vendre l’accès à ces camps à des touristes qui veulent voir des « femmes girafes ». Cette pratique a depuis été dénoncée par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés comme une forme moderne de zoo humain.

 

Une petite fille Padaung : 

 

 

Une jeune femme Padaung : 

 

Beaucoup de théories circulent au sujet des colliers géants des femmes Padaung pour expliquer les origines de cette coutume hors normes (à l’exception de certaines femmes de la tribu des Ndébélés en Afrique du Sud, cette pratique n’existe pas ailleurs dans le monde). Certains l’associent au fait que les Padaung penseraient que ces colliers empêcheraient les tigres de s’attaquer aux femmes et de les tuer en les égorgeant. D’autres encore pensent que les Padaung pratiquent cette coutume pour rendre leurs femmes si étranges aux yeux des étrangers que ceux-ci ne voudraient pas les enlever. Pourtant, à l’heure actuelle, ces colliers produisent l’effet inverse pour les Padaung : ces derniers considèrent que, pour une femme, avoir un long cou est un critère de beauté particulièrement important.

 

Une femme Padaung : 

 

De fait, il existe de nombreux mythes au sujet de ces bijoux. Tout d’abord, non, le collier n’allonge pas les vertèbres et ne les écarte pas (n’importe quel médecin vous dirait que cela occasionnerait la paralysie voire la mort), mais il produit une illusion d’optique en allongeant visuellement le cou, ce qui s’associe au tassement des os des épaules et des côtes sous son poids. Ce dernier n’est d’ailleurs pas constitué d’anneaux que l’on ajoute au fil de la croissance des jeunes filles, mais d’une spirale en métal qui est donc entièrement changée régulièrement pour être remplacée par un collier plus grand. À force de porter ces colliers, qui finissent par soutenir la tête à la place des muscles du cou et maintiennent la peau très (trop ?) protégée, il deviendrait dangereux pour les femmes Padaung adultes de les enlever.

 

Des femmes Padaung confectionnant des étoffes sur leurs métiers à tisser : 

 

Dans les faits, la culture Padaung, liée à la culture des peuples Karens, est encore peu connue au-delà de ces grands colliers emblématiques. Les Padaung et d’autres groupes Karens pratiquent d’autres modifications corporelles liées au port de bijoux, comme l’utilisation de gros et lourds anneaux visant à agrandir le lobe des oreilles. Un autre élément propre à la culture Padaung et Karen est la très grande importance sociale qu’ils accordent au tissage des vêtements. Les femmes Karens célibataires ont pour habitude de s’habiller avec des vêtements blancs ou de couleurs claires, et de tisser longuement à l’avance de magnifiques tenues aux couleurs chatoyantes pour leur mariage et leur vie matrimoniale. En fait, la vie maritale est tellement importante dans la culture Karen que si une femme meurt célibataire, elle est enterrée dans des vêtements de femme mariée (ce qui lui permettrait de rejoindre l’au-delà en paix).

 

Des étoffes tissées par des femmes Padaung : 

 

L’organisation sociale des villages Karens et Padaung est en règle générale structurée par le mariage : les femmes restent dans la famille de leurs parents, même mariées, les hommes rejoignent donc la famille de leurs épouses. Les biens agraires et immobiliers (maisons et champs) sont donc généralement transmis aux femmes tandis que les biens meubles (mobiliers et animaux) sont transmis aux hommes dans les héritages. Les Karens et les Padaung sont en général des fermiers produisant des céréales et des légumes et élevant des animaux. Ils sont particulièrement célèbres en Asie pour leur réputation en matière de domestication d’éléphants, dont ils seraient des cavaliers hors pair.

 

Une femme Padaung jouant de la musique : 

 

L’attachement de ce peuple à ses traditions si particulières malgré les difficultés qu’il rencontre est vraiment émouvant. À la rédaction, nous pensons qu’il est important d’aller au-delà des seuls clichés circulant sur certaines ethnies pour en apprendre plus sur leurs modes de vie et leurs coutumes. Pensez-vous qu’il est important de préserver ces traditions ?

 

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