Parfois surnommé « le tigre de l’herbe », la mante religieuse ne cesse de nous surprendre par sa voracité. On savait déjà les femelles capables de dévorer les mâles après s’être reproduites avec elles. Une récente étude montre qu’au delà de son régime à base d’arthropodes, ce redoutable insecte chasse et dévore même des oiseaux !

Une pratique répandue

« Ce n’est pas la petite bête qui va manger la grosse », dit on parfois pour calmer un phobique des insectes. Si cet adage s’applique (fort heureusement) aux humains, il souffre d’au moins une exception : les mantes religieuses, elles, mangent bien des oiseaux plus gros qu’elles. Une récente étude a été publiée dans le Wilson Journal of Ornithology revient sur ce surprenant phénomène.

L’équipe américano-suisse menée par Martin Nyffeler de l’Université de Basel a d’abord cherché à répertorier les attaques pour mieux les comprendre. On a toujours su que les mantes religieuses pouvaient être carnivores et manger de petits invertébrés comme les lézards. Il est d’ailleurs possible que les mantes religieuses soient capable de manger tout ce qu’elles peuvent lorsqu’elles sont affamées. Mais beaucoup de ces phénomènes de prédations avaient lieu lors de « combats » organisés en plaçant les adversaires dans des jarres. À l’état naturel, on manquait parfois de documentation.

Les ornithologues ont quant eux déjà répertorié de telles attaques par le passé. Mais l’essor d’internet (et notamment de YouTube) a permis à nos scientifiques de se pencher sur des événements prouvés. Au total, ils ont donc comptabilisé 147 attaques (depuis le XIXè siècle), concernant 24 espèces d’oiseaux différentes dans 13 pays (répartis sur tous les continents). Ce qui indique que les oiseaux ne sont pas des proies occasionnelles.

Connue pour sa voracité, la mante religieuse femelle se livre dans un tiers des cas au cannibalisme sexuel

Le mode opératoire

Les proies sont « toutes de petits oiseaux, mais tout de même, certains d’entre eux pèsent le tiers d’une once [environ 10 grammes], ce qui semble beaucoup pour n’importe quel insecte », explique Kenn Kauffman de la National Audubon Society. Cela pourrait expliquer pourquoi les attaques répertoriées ne concerne que des femelles (plus grosse que les mâles). Les mantes ne dévorent pas l’oiseau en entier, mais se content de son cerveau. Le mode opératoire est le même lors de chaque attaque.

La mante « approche l’oiseau, toujours suspendu tête en bas, pour entrer dans sa cavité crânienne par l’un des yeux pour se nourrir des tissus de son cerveau », explique l’étude. Pour cela l’insecte dispose de ses puissantes pattes avant. Il arrive que le festin se termine par une décapitation (comme lorsque la mante religieuse s’en prend à un insecte). Pire, la proie est parfois dévorée vivante au terme d’une lutte acharnée. Deux cas répertoriés montrent qu’il arrive que l’insecte copule tout en profitant de son repas. Une nouvelle preuve que le sexe et la nourriture font décidément bon ménage chez cette espèce.

Les mantes religieuses se posent à proximité des mangeoires pour capturer les oiseaux


Le colibri en danger ?

La répartition géographique de ces attaques est elle aussi intéressante. Près de 70 % d’entre elles ont eu lieu en Amérique du Nord. Or la mantis religiosa n’est pas une espèce autochtone. Originaire du bassin méditerranéen, elle s’est répandue naturellement vers l’Asie, mais n’a été introduite par l’homme sur le continent américain qu’au XIXe siècle. L’idée était d’utiliser leur voracité pour lutter contre les insectes ravageurs. À la suite de cette étude, les auteurs déconseillent fortement une telle pratique, qui pourrait faire courir un risque à des espèces d’oiseaux en danger.

La proie aviaire favorite de la mante religieuse est en effet le colibri, probablement en raison de sa petite taille. La mante religieuse peut-elle mettre en danger la survie de cette espèce ? Pas vraiment, nous répond Kenn Kauffman : « bien que ce comportement soit étrange, je ne pense pas qu’il représente une menace pour une quelconque espèce de colibri, car cela n’arrive pas souvent par rapport à la population total ». Une menace qui ne pèse pas lourd par rapport à la destruction des espaces naturels des oiseaux, par exemple.

Oiseau préféré des mantes religieuses, le colibri serait-il menacé par ces insectes?

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