Les zombies sont des créatures bien connues de nous tous, spectateurs contemporains. Cependant le zombie du grand et du petit écran est issu de traditions diverses, et il a connu des hauts et des bas. Depuis les zombies vaudous solitaires et serviles des années 1930 aux invasions à grande échelle des années 2010, le monstre le plus vu à l’écran a connu bien des évolutions. C’est cette histoire de créatures plus ou moins putréfiées et agressives que l’on vous propose de découvrir.

 

Bien avant le cinéma ou l’interaction de la culture américaine avec le Vaudou, la tradition picturale occidentale s’était déjà emparée dès le Moyen Âge de l’apparition de morts animés plus ou moins putréfiés attaquant les vivants. L’un des tableaux les plus célèbres de ce genre est Le Triomphe de la Mort de Bruegel l’Ancien, représentant des morts squelettiques s’en prenant à des populations de vivants désemparés. Cependant, pour comprendre l’apparition du zombie dans la culture occidentale, et surtout l’utilisation même du mot « zombie », il n’y a pas besoin d’aller aussi loin. En 1915, pour protéger les intérêts de banques américaines ayant investi sur place, le gouvernement des États-Unis occupe militairement Haïti, occupation qui durera jusqu’en 1934. Dans une atmosphère hostile à la culture haïtienne et à son indépendance, de nombreux ouvrages sensationnalistes concernant le Vaudou sont publiés aux États-Unis durant cette période. Qu’est-ce qui marque le plus le public américain dans cette vision déformée du Vaudou ? Le zombie.

Le Triomphe de la Mort de Bruegel l’Ancien : 

Dans cette vision de la tradition Vaudou, le sorcier vaudou est investi de nombreux pouvoirs dont celui, peu banal, de ramener les morts à la vie pour en faire des esclaves, ou encore de vider l’esprit d’une personne vivante pour en faire un serviteur docile. C’est en référence explicite et assumée à cette vision du Vaudou que le premier film mentionnant le mot « zombie » est réalisé en 1932, Les Morts-vivants (White Zombie en version originale). Dans le film, se déroulant en Haïti, un personnage plus que mal intentionné fait appel aux services d’un sorcier vaudou blanc, joué par le mythique acteur Béla Lugosi (l’interprète du premier Dracula du cinéma), pour qu’il change sa bien-aimée en zombie, et qu’elle accepte sa demande en mariage. Heureusement, la jouvencelle est sauvée par son fiancé en titre et un médecin. Le second grand film reprenant le zombie vaudou est Vaudou (I Walked with a Zombie), réalisé en 1943 par Jacques Tourneur, et ce dernier se déroule comme par hasard sur une île proche d’Haïti. On y suit l’histoire d’une infirmière devant soigner une femme qu’elle pense avoir été victime de rites vaudous, avant qu’elle ne découvre qu’elle est en fait un zombie (son coeur ne battant pas, il y a peu d’ambiguïté).

Le sorcier vaudou Béla Lugosi dans White Zombie : 

Bon, jusque-là, on est loin du cadavre putréfié assoiffé de chair fraiche. Après la Seconde Guerre mondiale le cinéma fantastique américain a changé d’orientation pour se tourner vers l’espace, et on ne trouve guère de zombies à l’écran que dans des films série Z à tout petit budget comme les films d’Ed Wood. Celui qui va fixer le modèle « canonique » du zombie tel qu’on le connait aujourd’hui, c’est George Romero. À la fin des années 1960, les grands studios américains et tout leur modèle d’exploitation sont à bout de souffle, ce qui laisse la place à des réalisations sortant des sentiers battus comme les films de Romero. La Nuit des morts-vivants (Night of the Living Dead), choque une Amérique auparavant anesthésiée par plus de trente ans de censure au moment de sa sortie en 1968. Le film de Romero forge de toute pièce le film de zombie moderne : les cadavres sortent des cimetières sans raison pour s’en prendre à des groupes de vivants isolés et acculés. Le zombie est pourri, il est décérébré, il est lent, et il dévore tout être vivant passant à sa portée.

La horde de zombies de Romero dans Night of the Living Dead : 

Romero poursuivra avec la réalisation d’autres films de zombies dans les années 1970 et 1980, mais son premier film de zombie acquérant un statut d’oeuvre culte, il est rapidement copié, notamment par l’industrie du cinéma italien, qui réalise de très nombreuses productions mettant en scène des invasions de zombies dans les années 1970. Un genre de film horrifique est fantastique à part entière est né, avec ses hordes de morts-vivants apparus suite à des maladies, des expériences scientifiques, des radiations cosmiques, ou alors tout simplement… sans raison. Les humains bien vivants s’y retrouvent quant à eux changés en zombies soit lorsqu’ils sont mordus, soit lorsque eux-mêmes meurent (ce qui, en général, revient au même), et il ne peuvent tuer les zombies qu’en détruisant leur tête. Ce schéma connaitra peu de variations, ce qui conduira petit à petit le genre à péricliter à la fin des années 1980 et au début des années 1990 faute de renouvellement suffisant, malgré des films toujours plus gores ou assumant un côté parodique.

28 jours plus tard a apporté un peu de tonus au genre : 

Pour assister au grand retour des zombies au cinéma, il faut attendre 28 jours plus tard (28 Days Later) de Danny Boyle en 2002, même si, ironie du sort, on n’y parle plus de zombies mais d’infectés : la zombification est issue d’un virus similaire à la rage, plus besoin de mourir pour finir en zombie donc, et en plus les zombies sont de véritables enragés qui n’ont plus rien d’apathique. Le zombie du XXIe siècle, plus réaliste et encore plus dangereux, était né, comme le montre la reprise de cette version 2.0 dans World War Z en 2013. Entre-temps, il a également pu devenir plus humain en se dotant d’un semblant de personnalité, comme dans Fido d’Andrew Currie en 2006, ou dans Warm Bodies de Jonathan Levine en 2013. Le zombie tel qu’on le connait a été « digéré » par le cinéma, mais aussi par la culture populaire avec les comics, les séries et les jeux vidéo.

Dans Warm Bodies les zombies redeviennent presque humains : 

Les zombies de cinéma sont vraiment passés à travers de nombreuses évolutions ! On se rend vraiment compte que l’histoire des films de zombies n’est pas un long fleuve tranquille, à l’image de la vie des gens qui essaient de survivre à ces apocalypses de morts-vivants :P. On se demande ce que le genre va bien pouvoir nous réserver à l’avenir. Préférez-vous les films de zombies à l’ancienne ou alors ceux ayant un style plus contemporain ?

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