L’Occident a toujours été fasciné par l’univers des geishas et son histoire. À tel point que la vision de ces artistes est bien souvent stéréotypée et réduite à la pratique de la prostitution alors que la tradition est bien plus complexe que cela. Mais la fascination, elle, est justifiée puisque rien n’est comparable à la geisha hors du Japon. Lumière sur l’histoire de cette pratique hors du commun.

 

Déjà, qu’est-ce que signifie geisha ? Étymologiquement, c’est l’association de deux kanjis signifiant respectivement art et pratiquant. Alors si la geisha est une artiste, de quel art s’agit-il ? De plusieurs pour être exact. De la danse, de la musique, de la poésie mais elles deviennent aussi expertes en littérature, en ikebana (composition florale), chanoyu (cérémonie du thé) et bien d’autres domaines encore. Même si on peut placer les prémices de la pratique aux premiers siècles de l’histoire du Japon, c’est véritablement à partir du début du XVIIIe siècle que les geishas se développent. Et depuis, que ce soit par leurs techniques ou leur beauté, elles sont restées un élément important de la culture japonaise.

 

 

Il faut savoir que dans le Japon ancestral, le chef de famille ne rejoint pas nécessairement sa femme pour assouvir ses besoins sexuels ou même pour s’épanouir amoureusement. Sa femme est avant tout la mère de ses enfants, la maîtresse de maison et une partenaire de vie. Pour la passion et le sexe, beaucoup d’hommes visitent les quartiers de plaisirs appelés yukaku. Cette tradition est alors vieille de mille ans au XVIIIe siècle, lorsque la cour impériale faisait appel à des saburuko, des servantes sexuelles capables de distraire un groupe grâce à des représentations artistiques. C’est avant tout là qu’est née la culture de la geisha.

 

 

Au fur et à mesure que les quartiers de plaisirs se développent, les établissements rentrent en concurrence et tentent de proposer bien plus qu’une simple prostitution en réconciliant les geishas avec leurs rôles ancestraux de pratiquer les arts. Ainsi, il s’agit surtout d’accompagner un homme, de savoir faire la conversation, d’animer la soirée en dansant ou en jouant de la musique et ensuite de le séduire jusqu’à l’acte sexuel. Afin d’être à la hauteur de la tâche, l’enseignement d’une geisha était des plus stricts et exigeait pour les jeunes filles de débuter leur formation dès l’enfance. La tradition voulait que la future apprentie commence à pratiquer les arts au sixième jour du sixième mois de sa sixième année.

 

 

Dans ces arts on trouve la musique avec la pratique du shamisen (instrument à trois cordes), de la flûte japonaise et de plusieurs tambours traditionnels. Peu à peu, elles pourront se spécialiser dans l’un ou l’autre tout en poursuivant avec une formation sur la cérémonie du thé, la composition florale et la littérature afin de les éduquer. La danse sera pratiquée le plus rapidement possible afin d’assurer une démarche gracieuse chez la future geisha. Durant ces années, la jeune apprentie suit les pas d’une autre geisha qui la dirige et la guide vers le monde qu’elle apprendra à connaître en finissant sa formation. La jeune fille devient alors shikomiko, c’est-à-dire apprentie geisha, et apprend par l’observation les faits et gestes de sa grande soeur spirituelle.

 

 

Viennent ensuite l’apprentissage du port du kimono, l’art de la conversation et du divertissement et enfin différents jeux de boisson. Elle passera alors au stade suivant de la formation en devenant maiko. À partir de là, elle peut accompagner les geishas dans des banquets et apprendre peu à peu à s’émanciper de sa grande soeur pour pouvoir être à l’aise par elle-même. Une fois jugée prête, elle devra passer par un rite de passage, une cérémonie dite du changement de col où elle enlèvera le col rouge symbolisant son statut de maiko pour un col blanc de geisha. Lorsqu’elle devient geisha, la maiko est parfois mise aux enchères pour qu’un client richissime puisse acheter sa virginité.

 

 

Bien plus que des prostituées, les geishas sont des dames de compagnie qui accompagnent parfois l’élite sociale pour que ces derniers puissent parader avec la plus belle fille possible. D’autres, moins prisées pour leur beauté, mais par leur talent d’artiste, seront appelées pour jouer de la musique ou danser lors d’une réception. Celles qui deviennent maîtres de leurs arts deviennent particulièrement demandées puisque les clients les voudront pour assurer la meilleure soirée possible aux convives. Les relations sexuelles sont alors un bonus ou même tout simplement ignorées. Éternellement célibataires, les geishas devront renoncer à leur métier pour toujours si elles en ont la possibilité, si elles veulent se marier et fonder une famille. Le plus souvent, si cela arrive, cela sera avec un client assez riche pour que la geisha se sache en sécurité du besoin et puisse quitter sa profession.

 

Malgré le déclin de la pratique depuis la Seconde Guerre mondiale où les femmes ont dû délaisser les métiers de plaisirs et d’arts pour travailler dans les usines, la geisha reste une icône de la culture japonaise. Même si beaucoup de prostituées ont usurpé le nom de geisha pour attirer les touristes dans la seconde moitié du XXe siècle, il est important de garder à l’esprit que la véritable geisha peut se prostituer, mais est surtout une pratiquante de nombreux arts dont la musique et la danse. Enfin, elle est avant tout une hôtesse pour animer les soirées.

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