Amateurs de cinéma, vous le savez certainement, il est très difficile d’adapter une œuvre de science-fiction et si certaines créations audiovisuelles rendent un fidèle hommage aux livres sur lesquels elles se basent, certaines tombent dans l’oubli quand elle ne deviennent pas sujet de moquerie. D’autres enfin, ne sont jamais adaptées. C’est le cas de Dune d’Alejandro Jodorowsky : ce scénario fantastique à la hauteur des plus grandes sagas de science-fiction réunies n’a jamais vu le jour. Le DGS vous dévoile les dessous du plus grand film de l’histoire.

Une fois n’est pas coutume, nous vous présentons aujourd’hui un film jamais diffusé. Basé sur l’œuvre éponyme de Frank Herbert, Dune est le fruit d’une collaboration entre Michel Seydoux et d’Alejandro Jodorowsky. L’histoire de ce film remonte à 1975, alors que le producteur français et l’artiste chilien se lancent dans la réalisation du « meilleur film de tous les temps ». Si la tâche parait aussi prétentieuse que compliquée, ils ne savent pas à l’époque que le livre connaîtra d’autres adaptations, sans jamais égaler l’œuvre originale. En effet, David Lynch se lancera dans l’aventure en 1984 et une mini-série sortira en 2000, toutes les deux devenant des échecs cuisants.

Affiche de Dune

LE LIVRE OFFRE D’INNOMBRABLES POSSIBILITÉS AU CINÉMA

Pourtant, le livre offre de nombreuses possibilités, en plus d’un récit magnifique : l’histoire se déroule en 10191 et les humains ont conquis tout l’univers connu. Pour ce faire, ils ont utilisé les Epices, ces produits décuplant leurs capacités physiques, uniquement trouvables sur une planète faite de sable nommée Arrakis, ou Dune par ses habitants. Dans une société où les intelligences artificielles sont proscrites, un homme règne en roi sur tous les autres : Shaddam IV possède l’univers. Entre jeux de pouvoirs et personnages fascinants, ce roman est certainement l’une des plus belles œuvres de science-fiction jamais publiées. Vous comprendrez donc que Dune plaise aux cinéastes qui voient en la quête du personnage Paul Atréides qui souhaite prendre le contrôle de la planète Arrakis et de l’Épice, un scénario en or.

Ceux ayant lu l’œuvre vous le diront : l’histoire ne s’arrête pas là et comprend de nombreux éléments et trames annexes pouvant et devant être intégrées au scénario du film. En 1975, Michel Seydoux et Alejandro Jodorowsky, connu au Chili pour ses œuvres surréalistes, s’imaginent pouvoir adapter judicieusement l’œuvre au cinéma et pourtant, ils ne le savent pas encore, ils se lancent dans une entreprise des plus compliquées. En plus d’adapter l’œuvre dans le plus grand respect, les cinéastes veulent créer un film révolutionnaire, à la hauteur de l’imagination du lecteur et surpassant les effets visuels alors utilisés.

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Dans le but de créer ce long métrage magistral (qui devait durer plus de 12 heures), Alejandro Jodorowsky s’entoure des plus grands : Salvador Dalí doit interpréter l’empereur quand sa fille doit prendre les traits d’Amanda Lear. Mick Jagger et Orson Welles doivent aussi apparaître à l’écran et Jodorowsky prépare même son propre fils pour qu’il prête ses traits à Paul Atréides. Durant deux ans, il suivra des cours d’arts martiaux auprès de Jean-Pierre Vignau, champion du monde de karaté.

PINK FLOYD ÉTAIT CHARGÉ DE LA BANDE-ANNONCE ORIGINALE

Jean Giraud, plus connu sous le nom de Moebius, est chargé de s’occuper des costumes et ensemble ils créent des vêtements magnifiques, sur papier seulement. H. R. Giger, célèbre notamment pour son travail sur Alien de Ridley Scott, travaille sur les décors du film. Enfin, les Pink Floyd sont chargés de la bande originale de cette oeuvre pharaonique.

Dès le début du projet, Jodorowsky imagine un film titanesque et c’est certainement cette imagination qui le perdra : l’homme passera des années à développer son œuvre, sans jamais y mettre un terme. Devant ses ambitions démesurées, les plus grands studios reculeront, voyant en l’investissement demandé un trop grand risque. Pourtant, le film ne devait coûter que 15 millions de dollars, une somme modique quand on connait les habituels financements hollywoodiens.

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A titre de comparaison, Star Wars (1974) coûta environ 13 millions de dollars et 2001, l’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick, sorti en 1968, fut créé avec seulement 12 millions de dollars. La somme demandée pour Dune n’était donc pas extravagante, sachant que le cinéaste avait déjà regroupé près des trois quarts du budget grâce à des financements européens. En fin de compte, il ne restait aux studios hollywoodiens qu’à investir 5 millions de dollars. En fin de compte et pour expliquer l’abandon des studios, Le cinéaste en viendra à la conclusion suivante : « Le projet fut saboté par Hollywood. Il était français et non américain. Son message n’était pas « assez Hollywood ». Il y a eu des intrigues, du pillage. Le storyboard a circulé parmi tous les grands studios. »

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Sabordé, le projet est annulé. Aujourd’hui, il n’en reste rien ou presque : Moebius et le reste des équipes créatives avaient réussi à créer un storyboard de plus de 3 000 illustrations. Le dossier fut trimballé de studio en studio et pourtant, on trouve son influence et quelques éléments dans d’autres œuvres cinématographiques. Aujourd’hui, le film est une légende d’Hollywood, un projet magnifique que peu de personnes espèrent encore voir mais qu’il vous est possible de découvrir au travers de nombreux dossiers et documentaires.

Aujourd’hui, il y a fort à parier qu’un tel projet rassemblerait les foules dans les salles obscures. Alors que les films de science-fiction cartonnent au box-office, une œuvre aussi célèbre et attendue que Dune par Alejandro Jodorowsky ferait office de référence cinématographique pour des générations de cinéphiles.

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