Au Brésil, des scientifiques ont trouvé la solution pour se débarrasser de la dengue, une maladie qui peut s’avérer mortelle et très répandue dans les pays tropicaux. Ils élèvent de nombreux moustiques génétiquement modifiés de telle manière qu’ils ne puissent pas transmettre le virus. DGS vous explique cette expérience en détail.

Il faut se rendre à Campinas, une ville située à une centaine de kilomètres de Brasilia, capitale du pays, pour trouver le laboratoire appartenant à la société anglaise Oxitec. Dans ce bâtiment, trois salles sont réservées à l’étude qui concerne l’élevage des moustiques. La première est remplie de cages contenant des individus femelles (ceux qui piquent) et quelques mâles qui vont se reproduire, dans la seconde, des plateaux remplis d’eau dans lesquels les larves se développent et dans la troisième, des flacons où sont enfermés des mâles peu avant qu’ils soient remis en liberté.

« Ici c’est l’ambiance idéale pour que le moustique Aedes aegypti, le principal vecteur de la dengue, se reproduise et grandisse », explique Sofia Pinto, une biologiste portugaise de 32 ans et responsable de cet élevage. Cet endroit est le premier au monde à avoir lancé la commercialisation de moustiques transgéniques destinés à combattre la dengue. Lancé en juillet 2014, le laboratoire attend que l’Agence de veille sanitaire brésilienne (Anvisa) donne son accord pour que ces insectes soient mis en vente. Actuellement, la « ferme à moustiques » d’Oxitec est capable de fournir 500 000 moustiques par semaine mais si le projet prend de l’ampleur, ce chiffre pourrait passer à 2 millions. Pour le moment, le labo est encore en train de démarcher auprès des mairies pour les convaincre, car ce sont elles qui combattent la dengue en première ligne.

La société britannique a importé une variété de moustique nommée OX513A, qu’elle a elle-même développée depuis 2002. Ce sont des insectes génétiquement modifiés dont les mâles sont relâchés dans la nature. Les chercheurs en libèrent une quantité deux fois supérieure à celle qui se trouve à l’extérieur, les moustiques non transgéniques. Les femelles sont gardées au labo pour la reproduction uniquement. « Une fois lâchés, les moustiques cherchent les femelles sauvages pour copuler. Mais grâce à cette modification génétique qui se transmet, toute leur progéniture mourra avant d’atteindre l’âge adulte et ils ne pourront ni piquer ni transmettre les virus de la dengue », détaille Sofia. « L’Aedes aegypti ne pique que les humains et ce projet vise seulement cette espèce d’insecte, originaire d’Afrique et considérée comme une espèce envahissante au Brésil », ajoute-t-elle. En conclusion, si jamais cette espèce disparaissait, ça n’aurait pas de conséquence pour l’environnement. C’est un moustique exclusivement cantonné dans les villes, qui ne pollinise pas les plantes et qui ne nourrit pas d’autres animaux.

Des tests ont déjà été réalisés aux îles Caïmans, aux Etats-Unis et en Malaisie depuis 2011. Les résultats ont montré que dans l’Etat de Bahia, au nord-est du Brésil, la population de ces moustiques a diminué de plus de 80 %. Une bonne nouvelle qui fera fatalement diminuer les cas de dengue. Cette maladie se décline suivant quatre virus différents et il n’existe aucun traitement ni vaccin pour s’en protéger. La seule solution pour s’en débarrasser est de boire beaucoup d’eau et de se reposer. Esper Kallas, un médecin à l’hôpital Syro-Libanais de Sao Paulo, explique : « Les symptômes varient et vont d’un léger malaise de type grippal à la fièvre, jusqu’à sa forme plus grave, hémorragique et la mort. Et chaque épidémie est une demande énorme pour les centres de santé publique qui n’arrivent pas à y faire face. »

L’Aedes aegypti affectionne tout particulièrement les eaux stagnantes pour se développer et la femelle ne pique que lors de la journée. A l’heure actuelle, les seules façons de lutter contre cet insecte (et par conséquent la dengue) sont d’utiliser des insecticides et d’éviter de s’approcher des points d’eaux stagnantes. Malgré tout, la solution imaginée par Oxitec semble à première vue plus efficace, même s’il faut pour cela attendre des résultats sur le long terme. Selon l’Organisation panaméricaine de la santé, le Brésil est le pays le plus touché par la dengue en 2014. Pas moins de 659 051 personnes ont été atteintes par le virus et 249 sont mortes. Depuis 2000, plus de 7 millions de gens ont été infectés.

Nous sommes ravis d’apprendre qu’une solution efficace contre la dengue ait été mise au point, même si nous avons quelques inquiétudes quant à ces manipulations génétiques. A la rédaction, nous n’osons pas imaginer la souffrance qu’endurent les personnes atteintes de cette maladie au quotidien mais nous espérons que cette initiative leur rendra la vie moins difficile. Pensez-vous que la génétique doive intervenir pour améliorer le quotidien de l’Homme ?

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